La lutte contre le soi impérieux (1) : passer à l’action

Le soi impérieux est rusé, envahissant, rebelle, dominant… il est nuisible à notre âme, mais paradoxalement indispensable à notre perfectionnement. C’est en effet son opposition farouche à l’éthique vraie et au divin qui rend possible notre transformation intérieure, à condition bien sûr qu’on ne le laisse pas prendre le contrôle de nous-même. Encore faut-il savoir comment s’y prendre. C’est l’objet de cette nouvelle série consacrée à la lutte contre cet ennemi intime, présent en chacun de nous.
Face aux attaques incessantes du soi impérieux, à moins d’accepter de subir à terme sa loi, il n’y a qu’une seule solution, lutter. Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer à première vue, la lutte contre le soi impérieux est un processus positif et constructif : l’objectif n’est pas tant de détruire un ennemi intérieur (qui en pratique est indestructible tant que nous sommes sur terre) que de se construire soi-même. La lutte contre le soi impérieux est en réalité l’outil qui a été mis à notre disposition pour nous connaître et accomplir notre perfectionnement.
Face à un tel enjeu, il est évident que la lutte ne peut se mener de n’importe quelle façon. Pour être menée à bien elle doit être méthodique et régulière. Comme il s’agit de lutter, il faut accepter de fournir des efforts réels contre les suggestions en général très plaisantes du soi impérieux. La lutte a quelque chose d’aride, elle suppose même souvent de faire preuve d’abnégation en réprimant ses tendances négatives et illégitimes et en s’imposant d’agir et de penser en fonction de ce qui développe et fait croître notre part céleste. L’aridité de la lutte est toutefois compensée par ses nombreux effets positifs : elle installe progressivement en nous une forme de sérénité, le sentiment de faire, malgré les échecs, les hauts et les bas, le maximum de ce qu’il nous est donné de faire. Elle est aussi liée au plaisir de comprendre et de connaître car elle constitue une source intarissable de découvertes. En ce sens, on peut la comparer aux études : longues et difficiles, mais en même temps passionnantes et qui nous permettront à terme d’obtenir un diplôme prestigieux. Enfin la lutte contre le soi impérieux est indissociable d’un sentiment toujours plus fort de la présence divine sans laquelle elle ne serait pas possible. Plus on lutte, plus les principes éthiques et divins sur lesquels on a fondé sa lutte prennent un sens concret et palpable, plus on en a une compréhension intime et profonde, comme s’ils faisaient corps avec nous.
Cette lutte se situe tout d’abord au niveau comportemental : il s’agit de barrer activement la route au soi impérieux et de régler nos paroles et nos actions non pas sur ses directives mais sur ce qu’il est authentiquement juste et bon de faire. Mais elle se situe aussi et surtout au niveau mental. La lutte contre le soi impérieux est un combat parfois violent mais silencieux et invisible, car même s’il se traduit en acte ou en parole, l’essentiel se réalise intérieurement, au niveau de l’intention qui oriente cet acte ou cette parole : si je me force, par exemple, à dire du bien de mon rival, c’est d’abord au niveau de la pensée que je me suis convaincu qu’il fallait faire cet effort. Pour prendre tout son sens, la lutte doit se mener de façon consciente, dans le cadre d’une réflexion personnelle et d’une démarche de perfectionnement intérieur. Il convient à tout prix d’éviter de considérer les principes éthiques et divins comme des dogmes extérieurs à pratiquer aveuglément ; il faut au contraire réfléchir sur leur sens et le contexte de leur mise en pratique de façon à lutter en connaissance de cause.
On peut diviser la lutte en quatre étapes qui dans la réalité peuvent être concomitantes mais que, dans un souci de clarté, nous allons ici séparer :
- préparer le terrain
- détecter en soi les manifestations patentes du soi impérieux
- réprimer les manifestations du soi impérieux
- analyser et réfléchir
Ces quatre étapes seront examinées tour à tour dans le cadre de cette nouvelle série.
Crédit photo : TuruMuru – stock.adobe.com
Cette création est mise à disposition sous un contrat Creative Commons
On sait que le soi impérieux ne nous quitte pas un instant et pourtant on l’oublie… on vit avec, on s’accommode de sa présence, on fait de petits arrangements pour avoir la conscience tranquille… merci pour ce rappel déjà très utile.. j’attends la suite avec impatience..
Génial! Programme essentiel!
Merci pour ce programme de lutte contre le soi impérieux. Cette semaine, une manifestation de colère m’a dépassée alors que j’étais « prévenue », c’est à dire que le contexte de la discussion présentait des risques pour moi. après coup, j’en ai été honteuse et un peu désespérée. La leçon est bonne à prendre puisqu’elle révèle des aspects que je ne me connaissais pas réellement. Je reprends cette phrase « … l’essentiel se réalise intérieurement, au niveau de l’intention qui oriente cet acte ou cette parole… ».
En plus de mon travail quotidien, et de ma famille, je monte un petit start up car j’ai de la peine à voir comment mon travail actuel pourrait continuer au-delà de 12 mois (et j’ai soixante ans). Puisque j’ai besoin d’y consacrer une quinzaine d’heures par semaine (au start up), il arrive qu’en fin de journée, quand ma famille me sollicite et me demande du temps, mon soi impérieux argumente en me disant « il faut que tu travailles sur ton projet, n’accorde pas trop de temps à ta famille, car tu n’as presque pas de temps… ». Cet argument est faux, car j’ai souvent du temps libre et j’arrive rattraper des éventuelles heures de retard.
Hier, j’ai été chez ma mère, que ne je voyais pas depuis quelques semaines, et à 19h du soir, après avoir passé la plupart de ma journée au travail, j’ai trainé les pieds avant de lui accorder de mon temps malgré son souhait évident de passer un peu de temps avec moi. Je n’ai donc pas réprimé les manifestations patentes du soi impérieux et j’ai écouté ses arguments. Heureusement je suis en train d’analyser mon comportement/mes erreurs pour mieux me comporter avec elle aujourd’hui.
Impatiente de lire la suite. De mon côté, une difficulté tient au fait de repérer les manifestations du soi impérieux en moi. Très habile à le voir chez les autres, je peine à le voir en moi-même. Un point qui m’a aidé ces derniers temps: ce que Bahram Elahi appelle l’attention parfaite. Dans la journée, en même temps qu’on tourne son attention vers le divin, on regarde en soi pour détecter le soi impérieux dans nos pensées et comportements. C’est ainsi que je me suis surprise à avoir des pensées de rivalité tout à fait enfantines, dans une situation dans laquelle je ne m’attendais pas à éprouver de tels sentiments.