Le chasseur de dragon: allégorie du soi impérieux

Conference de Leili Anvar, l'allégorie du dragon

« Il était une fois un chasseur de serpent qui partit dans la montagne dans le but d’attraper le serpent le plus gros qu’il pouvait… ». C’est par le biais d’un court récit de Rûmi, poète mystique persan du XIIIe siècle, que Leili Anvar, traductrice et spécialiste de la littérature mystique, introduit ici la notion de soi impérieux.

Le soi impérieux est un concept central dans la philosophie d’Ostad Elahi. Il est cette production de la psyché humaine de laquelle émanent des pulsions qui s’élèvent systématiquement et insidieusement contre toute pensée éthique juste et contre laquelle il nous faut lutter inlassablement pour assurer notre perfectionnement spirituel.

En analysant cette anecdote, en mettant en lumière sa portée morale et spirituelle, Leili Anvar nous rappelle la puissance de ce « dragon rugissant comme un lion » qui, alors même qu’on le croyait assoupi, peut ne faire de notre âme qu’une bouchée… Mais au-delà d’une simple description de ses manifestations et de ses ruses, son propos vise surtout à souligner la manière dont les spiritualités du passé envisageaient la maîtrise du soi impérieux : une stratégie d’évitement, qui consistait à l’éloigner de toute sollicitation par un retrait total de la société. Elle annonce ainsi l’une des caractéristiques de la spiritualité d’Ostad Elahi, qui, à l’anesthésie du soi impérieux, préfère le combat au corps à corps.

Écoutons l’histoire du chasseur de dragon :

➤ Le chasseur de dragon


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21 commentaires

  1. Sue le 30 Sep 2010 à 0:44 1

    Mâââgnifique ! On en veut encore plus !

  2. lol le 30 Sep 2010 à 11:35 2

    bravo , j’ai écouté ça ce matin au saut du lit et ça m’a remis les pendules à l’heure et les priorites en place,… merci encore!

  3. saranah le 30 Sep 2010 à 23:18 3

    Cette belle conférence tombe vraiment à pic : depuis quelques jours je sentais cette mauvaise partie de moi que l’on appelle le soi impérieux complètement endormie,et je me sentais bien :)) aujourd’hui tout s’est réveillé, et s’est manifesté par un énervement envers toutes choses, sans pouvoir de contrôle, et sans raison particulière. Il faut en effet toujours s’attendre à ce qu’il se réveille, c’est très dur et fatiguant, on a envie parfois de tout laisser tomber et de se laisser complètement aller. Mais la fierté que l’on ressent, lorsqu’on arrive ne serait-ce qu’un tout petit peu à maîtriser ce dragon en soi, est incomparable. Je ne parle pas d’orgueil à ce moment là, je parle de dignité, et même d’amour. Car lorsque par exemple on arrive à se contrôler vis à vis de quelqu’un, alors le coeur s’ouvre d ‘un coup. Il suffit parfois de faire un petit pas pour ressentir entièrement cette envie de se battre. Cela finit par prendre la forme, comme disait Bahram Elahi dans un de ses livres, d’un cercle vertueux. Plus on essaie, et plus le coeur ne s’ouvre pas qu’un peu, mais beaucoup, et de plus en plus souvent. Malheureusement, il y a de ces moments où on a l’impression que tout s’écroule d’un coup, car le dragon , comme le dit Rumi, n’est jamais mort, on a l’impression que tout ce que l’on a fait jusqu’à présent ne sert à rien, et d’être complètement englouti rapidement en un instant. C’est là où ce genre de conférence, et merci à elle, ce genre de site, ce genre d’articles, nous sont tellement nécessaires, nous sont d’une grande aide, d’un grand secours. Si on a encore une petite lumière en nous qui nous pousse à cliquer sur ce site par exemple, alors on peut espérer que toutes ces merveilleuses actions et paroles que l’on peut y trouver nous redonneront le courage, l’envie, car notre véritable moi vertueux, non plus, n’est pas mort. Oui, merci !!

  4. mila le 30 Sep 2010 à 23:40 4

    Vraiment, c’était trop trop court. Reste l’attente impatiente de la suite mais aussi la possibilité d’écouter, réécouter et méditer ce splendide passage, en attendant. Un grand merci.

  5. lm le 01 Oct 2010 à 9:13 5

    Je trouve ce conte très subtile.
    • d’une part, nous avons ce chasseur qui veut attraper le plus gros serpent possible, et qui a donc “les yeux plus gros que le ventre” : il s’est cru plus fort qu’il n’était en réalité
    • d’autre part, ce dragon endormi qui se réveille car son contexte a changé, j’en retire l’idée qu’il faut savoir également se contenter de ce que l’on a, de notre situation, car peut-être que dans un contexte que nous considérerions comme “plus favorable”, nous serions comme ce pauvre chasseur, et ne pourrions résister aux assauts notre dragon intérieur.
    Peut-être faudrait-il se méfier de certains de nos désirs, et que c’est d’eux qu’il faudrait s’éloigner ?

  6. saranah le 01 Oct 2010 à 13:35 6

    lm : je suis d ‘accord, il est très difficile de faire la part entre :
    – une « ambition » en quelque sorte justifiée, on a envie d’améliorer les choses ou de changer etc… , et c’est tout-à-fait légitime et parfois à son honneur
    – et le fait de considérer que rien n’est un hasard et que se retrouver dans tel ou tel contexte ou situation est justement bon pour nous, qu’en changer nous serait néfaste et réveillerait d’autant plus notre dragon intérieur. Il est vraiment dur de faire ce choix : j’y vais ou je n’y vais pas ? j’améliore ma situation, je désire légitimement, ou mon choix va t -il empirer les choses et me faire dévier ?

  7. Amigo le 01 Oct 2010 à 21:37 7

    Merci pour cette parabole. Elle résume très bien le combat quotidien que l’on devrait mener tous les jours.
    J’attends avec impatience de nouvelles histoires.

  8. Joseph Locanda le 02 Oct 2010 à 14:24 8

    L’art des histoires, c’est celui de permettre de comprendre les leçons les plus complexes de la vie.
    Je retiens de ce texte et commentaire brillant, les enseignements suivant :
    > Le soi impérieux ne dort jamais vraiment,
    > Il faut toujours rester éveillé car à tout moment il peut attaquer,
    > Inutile de frimer quand on le combat avec succès car il saura réapparaître là où ne l’attend pas,
    > L’endormir en fuyant le combat ne mène pas à la victoire,
    > Il vaut mieux lutter activement dans un environnement propice à réveiller et susciter le soi impérieux car là est le vrai enjeu,
    > L’objectif est de le maîtriser sans penser à le faire disparaître,
    > Plus on mène le combat, plus celui-ci devient subtil car le soi impérieux est plein de ressources,
    > L’humilité est le meilleur moyen de ne pas se faire duper.

    J’attends la suite en surveillant attentivement les manifestations de mon soi impérieux qui sait que j’ai écouté cette histoire et il m’attend forcément au prochain tournant pour me jouer un mauvais coup!
    >

  9. MIA le 02 Oct 2010 à 23:51 9

    Mercis pour vos commentaires
    Ca me remonte le moral quand je suis découragée et abattue …
    Ca nourrit mes pensées et garde ma motivation…
    Ca se rajoute à toutes les autres aides ET ça aide tellement.
    J’aime bien lire et relire certains commentaires, je me sens moins seule et moins isolée dans ma vie. je me rends compte que d’autres aussi ont les mêmes ressentis, les mêmes difficultés et ça crée un soulagement moral. Finalement, le chemin est un peu le même pour tous les êtres humains ???
    Oui le chasseur ne se rend pas compte vraiment des dangers et des risques. Personne ne lui a dit que le dragon pourrait se réveiller, qu’il était dangereux
    @lm@saranah
    j’aime bien votre réflexion sur le fait de se contenter de ce que l’on a et qu’avec certains désirs qui seraient satisfaits, on pourrait prendre des risques insurmontables… et qu’il faudrait bien réfléchir à ce qu’on veut faire évoluer…
    Belles perspectives de réflexions quand je vois toutes les choses que j’aimerais différentes et plus adaptées à mes besoins, peut-être que ce serait pire qu’aujourd’hui.
    Si j’arrivais à voir le positif dans ce que je vis aujourd’hui, je chercherai moins un dragon potentiel… peut-être!

  10. Marie le 03 Oct 2010 à 16:08 10

    Merci pour ce beau récit et ce commentaire très éclairant.
    La lutte contre le soi impérieux parait vraiment très inégale, si l’on considère que le soi impérieux cherche toujours à occuper le terrain et ne s’endort jamais, qu’il est là jusqu’à notre dernier souffle, que ses propositions sont très plaisantes, séduisantes et rusées,…Que ferions-nous sans Lui? En espérant ne pas être placés devant des épreuves trop difficiles pour nous. Un conseil de sagesse que je tire de ce récit est l’idée de ne pas se créer pour soi-même des difficultés, celles que nous offre la vie étant largement suffisantes. Et de ne pas désespérer quand on est dans le froid polaire ou dans le four, car nous ne sommes jamais seuls dans ce combat et que tout ce qui nous arrive à un sens, une valeur d’enseignement.

  11. loulou le 03 Oct 2010 à 19:44 11

    En écoutant ce récit, je me suis dis que pour vaincre en soi le dragon, il serait bien de s’en prendre à lui tant qu’il était bébé dragon. J’ai alors cherché à voir comment je pouvais appliquer ce principe dans ma vie. Et là, j’ai compris que bien souvent, si j’avais évité de nourrir certains sentiments négatifs éprouvées envers telle ou telle personne, notamment en évitant de me laisser aller à la médisance ou à la rumination de pensées pas très éthiques, cela m’aurait évité d’avoir à combattre un dragon. Ce qui s’avère très très difficile.

  12. mike le 04 Oct 2010 à 22:12 12

    bravo! très bonne idée cette forme audio et l’approche de la spiritualité moderne par les commentaires de Rumi; très utile également pour la famille entière…
    ça me rappelle les histoires de Pierre et le loup qu’on écoutait en boucle avec une teinte spirituelle à la clé
    merci encore

  13. Léa le 09 Oct 2010 à 19:21 13

    Merci pour cette histoire et ces commentaires, qui tombent à pic pour moi aussi:
    j’ai récemment expérimenté une explosion soudaine de mon soi impérieux. Il s’était fait oublier pendant quelques temps et s’est manifesté d’une manière et dans un contexte complètement inattendus. J’ai perdu tout contrôle sur ma raison et je ne m’en suis même pas rendue compte immédiatement.
    Il est très difficile dans ces moments-là de ne pas se décourager et baisser les bras – j’avais tellement honte de moi lorsque j’ai pris conscience de ce que j’avais fait que j’avais envie de disparaître sous terre! j’avais envie de pouvoir revenir dans le passé et me comporter différemment ou de pouvoir tout effacer! Mais comme le dit @Marie, « nous ne sommes jamais seuls dans ce combat et que tout ce qui nous arrive à un sens, une valeur d’enseignement ».
    Maintenant que quelques semaines se sont écoulées, je réussis à voir cet événement comme une décharge électrique qui a permis de me réveiller et de me remettre sur mes gardes; une piqure de rappel pour que plus jamais (ou pour aussi longtemps que possible) je n’oublie que mon soi impérieux ne dort jamais. A chaque fois que je repense à ce qui s’est passé je me dis que plus jamais je ne veux ressentir cette honte qui m’a envahie par la suite, plus jamais je ne veux me laisser surprendre par ce dragon malicieux!

  14. Bouboulina le 14 Oct 2010 à 11:37 14

    Merci pour ce podcast. L’histoire du dragon est en effet très instructive. Cela dit, je me demande si le poète n’a pas quand même un peu raison. Mettre le soi impérieux au congélateur peut aussi être une stratégie. Pas une stratégie qui nous fait avancer peut-être. Maus une stratégie qui nous empêche d’être dévoré tout cru. En décongelant le dragon, notre chasseur a perdu la vie. Il aurait donc été plus sage pour lui de le laisser où il était….
    Une question que je me suis posé en écoutant l’analyse de ce récit : si le but, c’est de mater le dragon et non de la congeler, concrètement comment on s’y prend ?

  15. mike le 10 Déc 2010 à 0:51 15

    @bouboulina
    apprendre à le connaître (savoir comment le dragon agit, vit, se nourrit) et à créer à petite dose les moyens de lutte pour le dompter progessivement
    ex : je peux être aimer me faire bronzer comme un lézard sur une plage au soleil et dégager des pensées positives, je ne suis pas obligé de matter toutes les filles qui passent surtout si je suis déjà avec quelqu’un… je nourris la bête avec ce qui a de licite (prendre un bain de soleil, se reposer, synthétiser de la vitamine D, changer de programme) et qui n’empiète pas sur le droit d’autrui ou qui entrave mes engagements envers une autre personne (pensées futiles, comparaison en tout genre, prendre plaisir et manger des yeux un repas (une chaire) qui n’est pas à la carte du chef de maison…)

  16. radegonde le 08 Mai 2011 à 23:17 16

    une histoire superbement bien racontée et commentée.. C’était difficile de « congeler le Dragon », il en fallait des ascèses.. mais tout était perdu d’un seul coup à la moindre erreur..
    Vivre avec « son propre dragon » et le regarder en face, si possible, c’est un exercice de tous les jours…..et Dieu sait comme c’est un exercice périlleux.
    Je tente de gagner du terrain depuis quelques années puisque je commence à repérer « mon dragon », surtout après coup..

  17. KLR le 30 Juil 2011 à 16:51 17

    Je me pose une question : Il ne faut pas congeler le soi impérieux mais le dompter.
    « C’est dans les sollicitations que le soi impérieux révèle son vrai visage… », et que du coup nous pouvons lutter…
    J’ai parfois le sentiment qu’il faut alterner ces moments de confrontations, entre autre avec les autres dans la vie active, avec des moments de recueillement personnel afin de prendre du recul, de se ressourcer et d’analyser notre comportement. Mais sans aucun doute, cela fait partie de la stratégie de lutte.
    je suis actuellement confrontée à la collectivité avec des collègues, et je ressens souvent le besoin de m’isoler pour prendre ce recul.
    Par exemple, en faisant un bilan ce soir avec ce sentiment de départ que ma journée avait été plutôt bonne au niveau de mon comportement, j’ai été frappée de voir qu’en réalité à plusieurs moments au moins 6 ou 7 fois, j’avais glissé, et que mon soi impérieux m’avait entraîné sur des erreurs…
    Et je suppose que je suis loin d’avoir tout vu…

  18. Ms le 16 Sep 2011 à 13:05 18

    @ KLR: Je pense voir ce que vous voulez dire et je suis tout à fait d’accord.

    Pour moi, c’est la cas de figure même de l’étudiant durant son année universitaire. Il se doit de travailler, d’étudier – ce qui est difficile et peut ne pas du tout être plaisant – mais pour être productif, il se doit aussi d’être stratégique dans sa manière de faire. Cette stratégie passe, principalement, par le fait tout simple de faire des « pauses », de s’aérer l’esprit comme on dit, non pas pour se dévier de son but – qui est de travailler – mais plutôt pour le mener à bien. En effet, ces moments où il décide de se couper de tout lui permettent, par exemple, d’être plus efficace dans son travail par la suite …

    Ici, on peut faire plusieurs analogies: la lutte contre soi-impérieu s’apparenterai au travail de l’étudiant (tâche pénible, difficile, qui s’apparente facilement à une lutte d’ailleurs …!) et « les pauses » seraient une analogie du recul dont vous parlez qui – comme vous le dites d’après vos expériences – est indispensable pour mener à bien sa lutte.

  19. mike le 19 Sep 2011 à 23:00 19

    @ klr et Ms : prendre du recul permet de voir aussi si on est sur la bonne longueur d’onde par rapport à une certaine approche de la Vérité; par exemple le travail sur soi devrait progressivement nous rendre plus humains et humbles; si l’on manque d’humilité c’est l’intention avec laquelle on travaille n’est pas juste…et c’est vrai que la confrontation avec les autres est intéressante pour cela…quelque fois se mettre en recul est aussi une manifestation du soi impérieux qui a été mise à l’épreuve et s’est vexé (comme la bête qui reçoit un coup sur la tête, elle est abasourdie et se met en rentrait pour prendre son souffle). Qu’il est rusé!

  20. Ms le 23 Sep 2011 à 15:50 20

    @ mike: J’avais oublié à quel point le soi impérieux est rusé ! Il est vrai que, pour lui, tous les moyens sont bons à partir du moment où ils lui servent d’atteindre son but … Cela rend notre tâche encore plus difficile …

    Cependant, c’est un fait et nous devons faire avec. Pour tenter d’y remédier, je pense que c’est là qu’intervient l’importance de l’attention dans tout ce que l’on fait. Se forcer à avoir l’attention, même un minimum si cela est très difficile, nous permet de rester focaliser et nous apporte une aide indispensable; aide divine primordiale pour permettre notre avancement en plus du fait de pratiquer au quotidien. On voit vraiment à quelle point elle est nécessaire, car sans elle tout peut basculer en un rien de temps !

  21. mike le 05 Jan 2012 à 20:13 21

    @MS c’est vrai vous avez raison sans l’intention pure de vouloir le contentement divin, combien d’actes ou même de paroles risqueraient de nous faire chuter! par exemple vous apprenez des mauvaises nouvelles à quelqu’un, quel est votre intention de départ? la bienveillance pour que les faits apportent du changement de comportement, le plaisir de rapporter ce genre de nouvelles, une motivation par la vengeance, de la maladresse, de la curiosité, de l’ignorance, de l’idiotie?

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